Résolution de la vente de l’immeuble par le vendeur.

Dans le contexte de la présence d’un droit de résolution de la vente contenu à l’acte de vente intervenu entre le propriétaire précédant et le propriétaire actuel de l’immeuble, qu’advient-il de l’hypothèque légale de la construction que vous avez fait publier afin de garantir le paiement de votre créance résultant des travaux faits à la demande du propriétaire actuel ?

À titre d’illustration : Le propriétaire actuel de l’immeuble, ou un entrepreneur général, selon le cas, retient vos services afin de procéder à la rénovation de l’immeuble. Vous faites vos vérifications habituelles telles que la validation de l’identité du propriétaire de l’immeuble. Vous débutez vos travaux, et à un certain point, soit en cours de chantier ou à l’intérieur du délai prescrit par la Loi, vous procédez à la publication d’une hypothèque légale de la construction.

Jusqu’ici tout va bien, vous vous dites : le paiement tarde à venir, mais au moins, la créance est sécurisée par l’hypothèque légale ! Or, vous apprenez que le propriétaire précédant avait consenti une balance de vente au propriétaire actuel et que ce dernier est en défaut de paiement. Comme c’est souvent le cas lorsqu’une balance de vente est consentie, le vendeur bénéficie d’un droit de résolution de la vente prévu dans l’acte de vente.

Il faut savoir qu’en vertu des articles 1740 et suivants du Code civil du Québec, le vendeur qui bénéficie d’une clause résolutoire pourra, après respect de certaines formalités prévues par la Loi, reprendre l’immeuble libre de toute charge dont l’acheteur aurait pu le grever. En d’autres termes, l’hypothèque légale que vous avez dûment publiée afin de garantir le paiement de votre créance pourrait devenir en péril.

Dans le paragraphe précédent, il est fait allusion à certaines formalités prévues par la Loi. L’une d’elles est le fait que le vendeur qui désire se prévaloir d’une clause résolutoire doit le faire dans les cinq ans de la vente. Autrement dit, de façon pratique, en tant qu’entrepreneur ou fournisseur de matériaux vous devez, lorsque vous faites la vérification de l’identité du propriétaire de l’immeuble, vérifier la date à laquelle l’immeuble à fait l’objet d’une vente pour la dernière fois. Dans les cas où la dernière vente remonte à plus de 5 ans vous n’avez pas à vous souciez à savoir si le vendeur pourrait bénéficier d’une clause résolutoire puisque le délai pour l’exercer est de toute façon échu. Toutefois, lorsque l’immeuble a fait l’objet d’une vente dans les cinq dernières années, vous devez, en plus de procéder à la vérification usuelle de l’identité du propriétaire, vérifier si le propriétaire précédent bénéficie d’une clause résolutoire.

Comment se fait une telle vérification ? En théorie, il suffit de consulter l’index aux immeubles. Dans la majorité des cas, en présence d’un droit de résolution, une inscription spécifique apparaîtra à l’index aux immeubles. Malheureusement, il arrive parfois qu’aucune référence à un droit de résolution n’apparaisse à l’index aux immeubles bien que le vendeur puisse tout de même bénéficier d’un tel droit prévu à l’Acte de vente. Ainsi, afin de s’assurer de la présence ou non d’un droit de résolution de la vente pouvant anéantir une éventuelle hypothèque légale de la construction, l’entrepreneur devrait avoir le réflexe, non seulement de consulter l’index aux immeubles, mais aussi l’Acte de vente comme tel. Il est utile de mentionner ici qu’en vertu de l’article 2943 du Code civil du Québec toute personne qui consulte l’index aux immeubles est présumée être informée non seulement des inscriptions y apparaissant, mais aussi des Actes et autres documents y étant mentionnés.

Pour conclure, ce qui importe de retenir ici est de pouvoir répondre à la question suivante : En tant qu’entrepreneur averti ayant constaté la présence d’un droit de résolution en faveur du vendeur, êtes-vous toujours disposé à effectuer des travaux, et ce, en sachant qu’en cas de défaut du propriétaire actuel vis-à-vis ses obligations à l’égard de son vendeur, ce dernier pourrait reprendre l’immeuble libre de votre hypothèque ?


Date de publication : 26 novembre 2019